La mondialisation se poursuit et de ce fait, une pluralité d’acteurs travaillent à modeler et à développer des mécanismes de régulation, aux côtés des gouvernements nationaux et des organisations internationales. Un ensemble de plus en plus important d’initiatives traversent les frontières et tente d’engager les agents économiques, en particulier les firmes, à contribuer à la promotion d’une économie globale juste et équitable. L’expression responsabilité sociale des entreprises est devenue à la mode et diverses parties prenantes s’appliquent dorénavant à propager et à renforcer les nouveaux outils d’action économiques et sociaux de régulation. L’on note même l’apparition d’un marché de la gouvernance d’entreprise, ainsi que de nouvelles formes de négociations transnationales. L’émergence de ces initiatives tend à confirmer l’existence d’un processus de « re-régulation » de l’économie mondiale, impliquant le transfert du pouvoir de réglementation de l’État vers les acteurs non gouvernementaux ainsi que vers de nouveaux partenariats entre agents privés, syndicats, consommateurs, investisseurs, ONGs et organisations gouvernementales et internationales.
Ces initiatives prennent diverses formes : codes de conduite, codes d’associations professionnelles, codes internationaux, ainsi qu’ententes cadres entre firmes multinationales, syndicats mondiaux et agences de contrôle. Elles sont développées depuis la fin des années 90 par les firmes et les acteurs issus de la société civile, comme les syndicats, les ONGs et les consommateurs. Les normes et procédures d’implantation qui en découlent se sont multipliées, compte tenu de l’appui grandissant des gouvernements et organisations internationales.
La responsabilité sociale des entreprises (RSE) et d’autres types d’initiatives transnationales peuvent jouer un rôle-clé dans la GGT. Les partisans de ces mesures avancent qu’elles peuvent contribuer à bonifier les normes du travail à l’échelle mondiale, faire progresser le rendement des entreprises, éduquer les consommateurs, améliorer la gestion des ressources et l’équité sociale. Cependant, particulièrement en ce qui concerne les normes du travail, l’efficacité de ces initiatives peut être mise en doute. On les présente souvent comme propices à la privatisation des normes du travail, étant donné qu’elles sont plus souvent associées à la régulation « souple » et volontaire du domaine commercial, mise de l’avant dans le but d’augmenter le rendement des entreprises.
De nombreuses questions se posent, notamment : qu’en est-il du bien-fondé et de l’efficacité de ces initiatives, en comparaison aux approches plus légales, plus « contraignantes », impliquant les acteurs étatiques ? Quelles sont les normes mises de l’avant ? Quels sont les mécanismes assurant le contrôle et l’application des normes ? Les initiatives servent-elles à combler un vide, à renforcer d’autres outils d’action (comme les conventions de l’OIT et la législation nationale) ou simplement à diluer la portée des mécanismes de gouvernance globale du travail ? Ces initiatives peuvent-elles réellement améliorer la responsabilité des entreprises et contribuer à rendre plus efficace la GGT ?
Seul le temps permettra de voir si les techniques de régulation qui dépassent les limites de l’application volontaire seront en mesure d’assurer une plus grande conformité et un nivellement vers le haut plus équitable des normes du travail. Cette section fournira des outils de recherche et de l’information pertinente lié au débat concernant la nature de ces initiatives et leur incidence sur la GGT.